
Le Roi n’a pas d’amis. Il n’a que des ennemis et des sujets.
Cardinal de Richelieu (Éric Ruf)
En route pour la France du 17e siècle en compagnie de ces soldats-gentilshommes passés à la postérité grâce à la plume d’Alexandre Dumas.
Première partie d’un diptyque qui renouvelle le genre « cape et épée » pour la nouvelle génération de cinévores pas forcément portés sur la littérature classique.
Le long métrage de Martin Bourboulon – à qui l’on doit les films Papa ou Maman et Eiffel – Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan remet au goût du jour une histoire et des personnages maintes fois adaptés au cinéma et à la télévision depuis plus d’un siècle. Ces mousquetaires doivent d’ailleurs être les personnages de la littérature française les plus adaptés dans le monde, et après une dernière version revisitée à la mode « steampunk » en 2011 dans les mains de Paul W.S. Anderson (la saga Resident Evil) et une plutôt bonne série made in BBC en 2014, il était temps que la France s’empare à nouveau de ses héros historiques.
Tout comme la version anglo-américaine des années 1970 avec laquelle j’ai grandi (réalisée par Richard Lester), Bourboulon découpe en deux chapitres le roman de Dumas (publié en feuilleton dans la presse en 1844), d’Artagnan est donc la première partie d’une histoire dont la suite, Milady, sort en salles en décembre 2023. Bon, c’est vrai, Lester a ajouté un 3e opus quatorze ans après le deuxième film, ce qui en fait au final une trilogie, mais passons 😉
La nouvelle itération française reste très fidèle à l’esprit du roman épique (peut-être un peu trop) et joue la carte du divertissement pop-corn avec ses scènes de combat filmées caméra à l’épaule et ses faux airs de western. Le réalisateur est soutenu dans sa tâche par un groupe d’acteurs solides : François Civil est le jeune d’Artagnan, Vincent Cassel, Romain Duris et Pio Marmaï sont respectivement les mousquetaires Athos, Aramis et Porthos, le roi Louis XIII et Anne d’Autriche sont joués par Louis Garrel et Vicky Krieps, sans oublier Eva Green dans le costume de l’intrigante Milady de Winter.
Le film utilise des décors naturels et des lieux historiques tous localisés en France et cela mérite d’être souligné, c’est sans doute – avec son casting – ce qui marque le plus à la vision du long métrage. Bien sûr, il aurait été compliqué de tourner dans les lieux exacts de l’Histoire tels que sont relatés les événements semi-réalistes nés de l’esprit de Dumas (qui s’est librement inspiré des vrais mousquetaires du roi). Par exemple le Roi de France régnait principalement depuis le Palais du Louvre en 1627 lorsque le film s’ouvre, à l’époque le Louvre ne ressemblait pas encore tout à fait à ce que nous connaissons de nos jours, et il a fallu trouver d’autres lieux de tournage pour figurer les riches intérieurs du palais royal.



La salle de bal du château de Fontainebleau; film (2023) vs réalité (2009)
Petit tour d’horizon des nombreux lieux de tournage de ce premier film :
- Le château de Fontainebleau (Seine-et-Marne) : la mythique salle de bal se transforme en salle du trône et du conseil pour le roi – et la galerie François-Ier est vue à plusieurs reprises, les deux salles doublant ainsi le palais royal du Louvre dans le film. Toutes les scènes d’intérieur entre le roi et le cardinal de Richelieu (Éric Ruf) ont été tournées là, c’est là aussi que d’Artagnan est reçu pour la première fois par le roi et c’est dans la galerie François-Ier que le jeune homme retrouve Constance Bonacieux (Lyna Khoudri) qui est la servante et confidente de la reine.
- Le Louvre (Paris) : on croise d’Artagnan dans l’imposant Escalier du midi et la scène de cérémonie à la fin du film, lorsque d’Artagnan devient officiellement un mousquetaire, a été tournée dans la Cour Carrée du musée, on reconnaît bien sûr le Pavillon de l’Horloge de l’aile Sully.



La salle de bal et détail de la Galerie François-Ier à Fontainebleau, Le Pavillon de l’Horloge au Louvre; film (2023) vs réalité (2009 et 2017)
- Les autres lieux de tournage comprennent les appartements de la reine, très richement décorés, qui se trouvent à l’Hôtel de Lauzun à Paris, c’est un hôtel particulier situé sur l’île Saint-Louis. Lorsque d’Artagnan arrive à Paris, en vrai il est à Compiègne dans la rue d’Ulm transformée pour l’occasion, et les scènes intérieures et extérieures de la caserne des mousquetaires sont en fait filmées dans plusieurs endroits en un vrai puzzle à résoudre au montage : une cour intérieure du château de Compiègne, le lycée de la Légion d’Honneur à Saint-Denis et l’Hôtel des Invalides à Paris.
- Le film est passé par Saint-Germain-en-Laye en Île-de-France et plus précisément par le Musée d’archéologie dans le domaine national, c’est là que la séquence au palais de Buckingham a été tournée. Ou encore l’abbaye de Royaumont dans le Val-d’Oise – cette dernière figure le Val-de-Grâce dans le film où la reine retrouve en secret le duc de Buckingham.
- Mais ce n’est pas tout : on bouge vers le centre-ville historique de Troyes (Aube) et sa Maison de l’outil et de la pensée ouvrière qui sert de chambre à d’Artagnan; c’est à la cathédrale Saint-Étienne de Meaux (Seine-et-Marne) que l’attentat contre le roi prend place lors du mariage de son frère.
- Vous aurez bien évidemment reconnu les jardins de Chantilly avec le château en arrière plan lors de la partie de chasse entre le roi et la reine. Ensuite direction la Bretagne avec la Plage Bonaparte de Plouha où Buckingham débarque en France.
- Et encore d’autres lieux dont ceux que l’on découvrira dans le second chapitre en fin d’année, notamment Saint-Malo qui sert de doublure à La Rochelle pour le siège de la ville, le Fort La Latte (toujours en Bretagne), les châteaux de la Cordelière et de Farcheville…




L’escalier en fer-à-cheval et la salle de bal à Fontainebleau (film et réalité).
Saviez-vous que le roi Louis XIII était né au château de Fontainebleau ? Château royal sous François Ier au 16e siècle, à qui l’on doit la transformation du château féodal d’origine en style Renaissance et continuée sous le règne de son fils Henri II, les rois suivants le délaisseront pour le Louvre. C’est Henri IV qui reprend les travaux et à son tour son fils Louis XIII y bâtit le majestueux escalier en fer-à-cheval à l’extérieur.
Au Louvre également, Louis XIII reprend les travaux destinés à transformer les vestiges du château féodal en palais Renaissance, sous son règne (1610-1643) vont apparaître la Cour Carrée et le projet du Pavillon de l’Horloge.




La Galerie François-Ier à Fontainebleau, dans le film et dans la réalité.
Et ces fameux mousquetaires, alors, qui sont-ils ?
Le roi Louis XIII crée la Compagnie des Mousquetaires du Roi en 1622, une sorte d’armée d’élite formée de gentilshommes, qui protège et escorte le roi lors de ses déplacements (vers ses nombreuses demeures, notamment), mais partent aussi à la guerre. Ils tirent leur nom du mousquet qu’ils utilisent (l’ancêtre du fusil) et ce même si le cinéma a tendance à toujours nous les montrer ferraillant avec leurs épées. Leur uniforme est de couleur vive – d’abord une casaque bleue avec croix blanches, ensuite un uniforme rouge brodé d’or – et donc les costumes sombres en cuir des dernières adaptations sont complètement loufoques ! Leur devise n’était pas réellement Tous pour un et un pour tous mais l’expression est passée à la postérité grâce au roman de Dumas. La compagnie des mousquetaires est dissoute vers 1775.



La Cour carrée du Louvre dans la scène finale du film et dans la réalité.
D’Artagnan a-t-il existé ? Eh bien oui ! C’est d’ailleurs le seul des quatre mousquetaires du roman de Dumas qui a réellement vécu. Charles de Batz de Castelmore d’Artagnan du régiment des Cadets de Gascogne arrive à Paris vers 1630, devient mousquetaire du roi Louis XIII et sera promu au commandement de la prestigieuse compagnie sous Louis XIV.
Vous pouvez retrouver plus d’images tirées du film Les Trois Mousquetaires dans la rubrique Galerie de photos du site.
Photos : @Simply.Mad 2009 et 2017 (et captures d'écran du film Les Trois Mousquetaires : D'Artagnan © 2023 Chapter 2 – Pathé Films – M6 Films)