Génie artistique en mode road movie

Affiche du film Light Thereafter

Si je suis normal, est-ce que je peux rester ? Je peux ? Si je suis normal ? Je peux rester ?

Pavel (Barry Keoghan)

Cette semaine je vous emmène dans les pas du surprenant acteur irlandais Barry Keoghan qui porte le film du réalisateur bulgare Konstantin Bojanov, Light Thereafter, sorti en 2017. Cette même année, Keoghan marquait le grand écran avec ses prestations dans le Dunkerque de Christopher Nolan et dans Mise à mort du cerf sacré de Yórgos Lánthimos. Le deuxième long métrage indé de Bojanov a des similitudes avec son premier film, Avé, sorti en 2011. Dans les deux cas, nous suivons un.e jeune un peu paumé.e sur la route et sommes les témoins de leurs rencontres, plus ou moins heureuses.

Pavel (Keoghan) vit en Angleterre avec sa mère qui a immigré de Bulgarie ; porteur d’un trouble du spectre de l’autisme, le jeune homme quitte subitement école et domicile pour rencontrer le célèbre peintre Arnaud (Kim Bodnia, acteur danois vu dans les séries Killing Eve et The Witcher) qu’il vénère. Lui-même artiste dans l’âme (il peint et écrit des poèmes), Pavel veut apprendre de lui en tant qu’artiste. Il alterne les moyens de transport pour se rendre en Belgique où vit le peintre. En cours de route, il retrouve sa tante (jouée par la Franco-russe Dounia Sichov) qui vit – apparemment – à Anvers, il va entre autres tomber amoureux et se faire arnaquer pendant son périple.

Co-production bulgare, belge et britannique, le film est tourné essentiellement en Belgique, entre Anvers et Écaussinnes. C’est parti pour un road trip complexe… car ce que je ne vous ai pas encore dit, c’est que le film est présenté dans un ordre chronologique inversé. Le long métrage s’ouvre sur la dernière scène et remonte le temps jusqu’au départ d’Angleterre. Un peu ardu à suivre, mais je vais tenter de respecter la chronologie des lieux de tournage vus à l’écran sans vous perdre en chemin !

Quand le film débute, nous sommes au château d’Écaussinnes-Lalaing, en province du Hainaut, qui sert de décor à la propriété du peintre Arnaud. Pavel est confronté au caractère volatile d’Arnaud, il vaut mieux ne pas rencontrer ses idoles, ce que le jeune homme a du mal à accepter. La pièce qui sert d’atelier est en réalité le grand salon au premier étage du château-fort médiéval (les premières traces de sa construction remontent au moins au 13e siècle). Cette partie du château a été rénovée au 16e siècle et remeublée au 18e. Si les meubles ont laissé la place aux tableaux et au matériel de peinture dans le film, on peut voir à l’image la cheminée dite « Adam et Ève » en raison des personnages sculptés qui la décorent (pommier et serpent inclus, comme dans le mythe), les armoiries sur le manteau de la cheminée sont celles de la famille de Croÿ (un temps propriétaire du château entre les 15e et 16e siècles) ; la taque de foyer en fonte présente les armes de Charles Quint.

Le grand salon et la cheminée d’Adam et Ève (le 15ème rencontre le 18ème siècle).

Plusieurs scènes du film se passent dans ce salon alors que Pavel tente de s’imprégner du lieu de vie du peintre qu’il admire, tout en tentant de l’intéresser à son propre travail. On visite aussi le jardin du château situé de l’autre côté de la rue qui donne accès au château, un jardin-potager aux lignes droites traversées d’allées invitant à la promenade.

L’accès vers le jardin-potager du château, la cour d’honneur et l’arcade recouverte de lierre.

Scène suivante : Arnaud prend un repas avec sa compagne Soumaya (l’actrice belge Lubna Azabal, vue dernièrement dans la série Braqueurs et à l’affiche des films Rebel et Simone, le voyage du siècle). Elle tente de le convaincre de laisser sa chance au jeune visiteur. Ils sont attablés dans la cour d’honneur du château qui donne sur les pommiers en contrebas. Agacé, Arnaud quitte la table et se dirige vers l’arcade parcourue de lierre grimpant derrière lui.

Scène suivante : Pavel arrive au domicile du peintre – souvenez-vous, le film est monté à l’envers – il arrive devant le portail rouge à l’entrée du château, le passe et découvre la cour d’honneur. Il se dirige vers la porte d’entrée du château (partie musée actuelle) et Soumaya l’interpelle depuis l’aile à gauche (partie privée du château). Pavel dit être venu à pied de La Louvière, ce qui place géographiquement le château dans sa localité réelle puisque la ville citée est à 15 km de là. Sauf qu’on le voit juste avant (enfin, après dans le film) être pris en stop et puis voulant acheter un ticket de train à la gare d’Écaussinnes. Bref, la temporalité du film s’égare un peu dans la géographie des événements ou vice versa 😉

Le château-fort d’Écaussinnes-Lalaing sur son éperon rocheux; la cour d’honneur.

La gare d’Écaussinnes a subi pas mal de transformations depuis le tournage, les quais ont été totalement rénovés, un grillage a été installé le long du quai numéro 1 et de 4 voies à l’époque du tournage, on est maintenant passé à 3 voies. On peut entendre dans le film l’annonce faite en gare : « Voie 3, train IC à destination de Braine-le-Comte… » alors que le jeune homme est devant l’automate sur le quai 1.

Il est rejoint dans le souterrain d’accès aux autres voies par la fille qu’il a rencontrée pendant son périple, Julie vient lui dire au revoir (elle est interprétée par l’actrice française Solène Rigot, vue dans les films Orpheline et La Confession). Quelques années après le tournage de cette scène, il est amusant de noter que les nombreux graffiti qui habillent le couloir souterrain n’ont pas été recouverts lors des travaux. On y reconnaît les mêmes tags que dans le film.

Juste après, on les voit arriver ensemble en van à la gare d’Écaussinnes. On apprendra par la suite que Julie et une autre fille ont été prises en stop par le même gars qui a embarqué Pavel à Anvers. C’est en effet à Anvers que Pavel tombe sur Ilych (l’acteur danois Thure Lindhardt, Anges & Démons, les séries Les Borgia et The Last Kingdom) avec qui il fait un tour nocturne de la ville flamande, débutant au quartier des marins, célèbre pour ses vitrines où la prostitution s’affiche.

Ilych vole une camionnette sur le parking sous la promenade Zuiderterras le long de l’Escaut en plein centre d’Anvers. La scène est tournée au niveau du Tunnel Sainte-Anne qui passe sous le fleuve, en face c’est le quartier Linkeroever. Scène suivante : Pavel est en admiration devant la « cathédrale du rail », on le retrouve en effet à l’intérieur de la gare d’Anvers-Central inaugurée en 1905 et déjà longuement vue dans le film The Expatriate.

La promenade le long de l'Escaut à Anvers
Sous la promenade Zuiderterras à Anvers.

Parmi les remerciements du film, on retrouve le quartier londonien de Hackney où ont sans doute été tournées les scènes de la partie anglaise du film, notamment à l’école Petchey Academy. En Belgique on trouve encore les communes de Malle et de Bornem et le domaine Heihuyzen, tous trois à côté d’Anvers.

Les œuvres que peint Pavel dans le film sont en réalité de l’artiste belge Michaël Borremans

Le saviez-vous ? Parmi les illustres voyageurs qui ont fait halte au château d’Écaussinnes-Lalaing à travers les siècles, il en est une qui y resta : Blandine Rubens, la sœur du futur grand peintre Pierre-Paul Rubens, est enterrée dans l’église Sainte-Aldegonde à proximité du château.

Vous pouvez retrouver toutes les images tirées du film Light Thereafter dans la rubrique Galerie de photos du site.

Découvrir les films tournés à Anvers et ceux filmés au Hainaut.

Photos : @Simply.Mad 2019 et 2022 (et captures du film Light Thereafter, Latido Films 2017)

Publié par Simply.Mad

Geek, cinéphile, fan de science-fiction et de bande dessinée. Aime un peu trop le chocolat.

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