
Montée par la Cinémathèque française à Paris où elle a été inaugurée en 2022, célébrant le quarantième anniversaire de la disparition tragique de l’actrice, la magnifique rétrospective débute son itinérance en faisant escale en premier lieu au cinéma Palace de Bruxelles.
Courez vite la voir jusqu’au 25 juin 2023 !
Pourquoi l’actrice européenne qui a marqué plusieurs générations continue-t-elle à fasciner les jeunes cinéphiles ? Que ce soit pour le grand public – pour qui elle restera à jamais la jeune impératrice Sissi – ou pour ceux qui ont suivi ou continuent à découvrir sa filmographie tellement riche, Romy Schneider reste à jamais une icône du grand écran.
De son vrai nom Rosemarie Albach-Retty, la future Romy Schneider est issue d’une longue lignée de comédiens de théâtre et de cinéma. Sa maman, l’Allemande Magda Schneider, est la vedette de plusieurs succès populaires dans les années 1930 (surtout des opérettes filmées car elle chantait aussi) et a quand même tourné pour les réalisateurs Anatole Litvak et Max Ophüls. Son père, l’Autrichien Wolf Albach-Retty, a été la star de films muets et parlants avant de se voir reléguer à des seconds rôles après la seconde guerre mondiale.



Affiche du film Prête-moi ton mari, perruque portée pour Sissi, les jeunes années en France.
Née en 1938 à Vienne, la petite Romy suit les traces parentales en apparaissant aux côtés de sa mère dans un premier film dès 1953, Quand refleuriront les lilas blancs. Elle y joue la fille du personnage interprété par sa maman Magda, à 15 ans elle quitte alors le pensionnat et sa carrière est toute tracée. Elle enchaîne les succès populaires (Les Jeunes Années d’une reine où elle joue la monarque britannique Victoria, Mam’zelle Cri-Cri où elle retrouve sa maman actrice cette fois dans le rôle de sa tante) jusqu’à la consécration internationale en 1955 avec Sissi et ses deux suites.
Enchaînant les films en Autriche et en Allemagne, elle est appelée pour un premier film tourné en France : Christine (1958) qui marque sa rencontre avec Alain Delon et donnera une autre direction à sa carrière et à sa vie de femme. Vite étiquetée en Allemagne où elle était souvent cantonnée aux films historiques romancés, c’est en France qu’elle se fera un chemin vers un cinéma plus exigeant, à force de travail (déjà pour dompter une langue qui lui est étrangère) et de volonté.



Costumes portés par Romy Schneider dans les films La Banquière, César et Rosalie et Le Vieux Fusil.
Dans ces premières années hors d’Allemagne, elle travaillera avec Robert Siodmak, Luchino Visconti, Orson Welles… et c’est tout naturellement qu’elle répond aux sirènes d’Hollywood où elle tourne plusieurs films en trois ans, touchant à tous les registres avant de vite revenir en Europe où le cinéma semble mieux lui convenir. Car la dame est exigeante, ce métier elle l’aime plus que tout, quand on engage Romy Schneider, elle ne se contente pas de réciter son texte, elle a besoin de comprendre son rôle, elle collabore à développer son personnage, elle doit ressentir les dialogues au plus près de la vérité. Et c’est en France que ce talent brut va finalement pouvoir le mieux s’exprimer : Delon rappelle son ancienne compagne pour La Piscine de Jacques Deray en 1969 et c’est un triomphe.



Le film avorté L’Enfer, son second César de la meilleure actrice, un portrait en noir et blanc par Jeanloup Sieff.
La suite ? On ne compte plus les films marquants qui ont jalonné les années 1970 : L’important c’est d’aimer (Zulawski, 1975), Le Vieux fusil (Enrico, 1975), Une Femme à sa fenêtre (Granier-Deferre, 1976) et surtout sa collaboration fructueuse avec le réalisateur Claude Sautet avec qui elle tourne cinq films dont les classiques absolus que sont Les Choses de la vie (1970), Max et les ferrailleurs (1971), César et Rosalie (1972). Elle accepte même de retrouver le rôle qui a marqué ses débuts : elle redevient l’impératrice Sissi pour Visconti dans le sublime Ludwig : Le crépuscule des dieux aux côtés d’Helmut Berger (1973).



Son statut de star internationale est garanti, elle peut se permettre de refuser des rôles, les plus grands couturiers l’habillent pour ses films : Chanel, Courrèges, Yves Saint-Laurent…
Elle obtient deux César de la meilleure actrice pour ses rôles dans L’important c’est d’aimer et Une histoire simple (1978).
Le tournant des années 1980 lui permet de continuer à expérimenter, à la quarantaine, avec des rôles forts dans des œuvres marquantes : La mort en direct (Tavernier, 1980), La Banquière (Girod, 1980), Garde à vue (Miller, 1981) et cet ultime chef d’œuvre qu’est La Passante du Sans-Souci (Rouffio, 1982) et où le mal-être de l’actrice, à qui la vie a tout donné mais également tout pris, crève l’écran de façon déchirante. Malade, elle décèdera en 1982. Elle avait 43 ans.



La rencontre avec Delon sur Christine, une femme libre, son premier César (avant que la statuette ne devienne le monolithe bien connu).
C’est tout ceci et tellement tant d’autres choses que l’exposition nous donne à voir. À travers des dizaines de photographies, dont certains portraits en noir et blanc rarement vus, des affiches de films, les costumes qu’elle a portés, des scénarios et des notes manuscrites qui montrent la relation de travail passionnée qu’elle avait avec ses réalisateurs, des extraits de films dont cette mise en scène autour du film culte La Piscine, etc.
Une femme d’abord, une actrice ensuite, dont la présence dans la mémoire des cinévores reste toujours aussi vive, quarante ans après sa mort. Magnétique, passionnée et passionnante, venez découvrir d’urgence ce merveilleux hommage à Romy Schneider, en plus dans un lieu extraordinaire : l’ancien cinéma historique de Bruxelles, le Pathé Palace, rebaptisé simplement le Palace depuis sa réouverture en 2018 après 15 années de travaux. On ne peut que féliciter le maintien de ce lieu emblématique de la capitale, par chance classé au patrimoine architectural de la ville. La partie de l’expo qui se trouve dans le foyer Hamesse, salle sur deux niveaux de style Art nouveau avec quelques touches annonciatrices de l’Art Déco, et où se trouvait jadis le café-restaurant du cinéma à la grande époque, vaut à elle seule le coup d’œil.
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Photos : @Simply.Mad 2023