
Une exposition qui vient de se terminer au musée Bozar de Bruxelles et qui va être proposée au Jeu de Paume à Paris à partir de septembre 2024, je vous invite à partir à la découverte d’une grande cinéaste de son temps.
Première exposition d’envergure consacrée à la réalisatrice-scénariste belge en parallèle d’une rétrospective de ses films à la Cinematek, c’est tout naturellement dans sa ville de naissance, Bruxelles, qu’on pouvait découvrir son travail à travers recherches photographiques, pages de scénarios, extraits d’interviews et installations vidéos.
Dans les magnifiques salles Art déco du Palais des Beaux-Arts, il nous était donné de voir une histoire visuelle du cinéma de Chantal Akerman dont la carrière entamée en 1968 à 18 ans à peine est passée du court métrage expérimental au documentaire pour finalement s’essayer au long métrage avec succès, marquant les années 1970 de son chef d’œuvre absolu : Jeanne Dielman, 23 quai du commerce, 1080 Bruxelles, une œuvre élue en 2022 meilleur film de tous les temps par le British Film Institute, la première fois qu’une réalisatrice était ainsi honorée par ce classement très respecté par la profession et les critiques.



Tout ce qui fait habituellement fonctionner le spectateur, c’est l’identification au personnage. Or, dans mon film, il n’y a pas de héros et pas de narration classique. Ça fonctionne ailleurs, sur des rythmes, sur des pulsations, sur le regard, une image en amène une autre, c’est comme une musique, tu suis des notes, là tu suis des images, tu ne peux faire qu’une chose, regarder, écouter et cela te met en question comme spectateur(…).
CHANTAL AKERMAN au sujet de News from Home (1975)



Photos de recherche de lieux de tournage, diapositives et rushes des films Rendez-vous avec Anna et News from Home.
L’exposition revient ainsi de manière chronologique sur son parcours atypique et c’est à grand renfort de documents visuels inédits qu’elle nous aide à comprendre les motivations de l’artiste belge qui a su très jeune ce qu’elle voulait faire, qui n’a pas eu la patience de terminer ses études de cinéma à l’INSAS et qui s’est très vite lancée, curieuse de tout et caméra à la main, au hasard des rencontres heureuses parmi la profession, l’emmenant de la Belgique à Paris et à New York.
Montée avec l’aide de la Fondation Chantal Akerman, l’expo présente encore des archives inédites et donne même l’occasion de feuilleter les scripts complets et des documents de recherche, nous permettant de vraiment nous immerger dans l’aspect créatif, passionné et passionnant de l’artiste toujours très étudiée dans les plus grandes écoles de cinéma du monde.





Jeanne Dielman : scénario, notes, photos de tournage et installation vidéo.
La partie consacrée à Golden Eighties, son incursion dans la comédie musicale, un film sorti en 1986 au cinéma, nous montre le travail préparatoire, notamment à l’aide de photos de grandes vedettes de l’âge d’or d’Hollywood (Greta Garbo, Gary Cooper, Ingrid Bergman, Louis Jourdan, etc.) que la réalisatrice imaginait dans les rôles principaux de son futur film, à titre d’inspiration, rôles finalement échoués à Delphine Seyrig, John Berry, Fanny Cotençon, Lio… Des photos de tournage montrent également les décors du film construits en studio à Paris et imitant à l’identique les magasins de la Galerie de la Toison d’Or à Bruxelles où se passe l’action du long métrage.
Enfin, plusieurs installations sonores et vidéos montées à diverses époques de la carrière multidisciplinaire de Chantal Akerman – en collaboration avec la monteuse Claire Atherton qui l’a accompagnée dans chacun de ses projets pendant 30 ans – étaient à nouveau regroupées ici, parmi lesquelles les 25 moniteurs de l’œuvre D’Est, au bord de la fiction (1995) et ses images captées derrière le Rideau de fer qui venait alors de tomber.


En bonus, l’héroïne du film Jeanne Dielman, interprétée par Delphine Seyrig, est représentée depuis 2023 dans une fresque murale apparue à proximité du Quai du Commerce justement, dans le quartier des quais/Sainte-Catherine à Bruxelles. Un détour absolument nécessaire pour tout cinéphile qui se respecte lorsque vous passez par la capitale.
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Photos : @Simply.Mad 2024
