Dans les coulisses de la série Oktoberfest

Alors que la célèbre fête annuelle de la bière munichoise s’est terminée au début du mois d’octobre et que la saison 2 de la série qui porte le même nom était diffusée au même moment sur la chaîne allemande ARD, l’occasion était toute trouvée de vous parler des quelques jours de tournage auxquels j’ai pu assister au mois de mars 2024.

Coulisses d’une série en quatre épisodes tournée en partie en Belgique.

Peut-être aviez-vous suivi en 2020 la première saison diffusée sur Netflix à l’international, sous le titre L’Empire Oktoberfest, une série allemande en 6 épisodes qui voguait sur le succès de Peaky Blinders et tentait d’en adopter l’atmosphère tout en transposant l’argument de base en traitant d’un sujet très teuton.

L’histoire nous raconte en effet l’ambition d’un brasseur à Munich au tout début du 20e siècle et ses pratiques peu scrupuleuses afin de contrôler la fête de la bière, la fameuse Oktoberfest, institution déjà très importante à l’époque en Allemagne, et donc forcément très lucrative.

Pour la saison 2, la société de production allemande Violet Pictures a ainsi jeté son dévolu, entre autres, sur les intérieurs de la partie administrative du Musée de la mine et du Développement Durable de Bois-du-Luc à La Louvière. Un ancien site minier dont je vous ai déjà parlé puisqu’il est régulièrement sollicité par des tournages de films et maintenant de séries également.

Installation de luminaires et d’un téléphone d’époque au Musée de Bois-du-Luc

La partie qui intéressait la production consistait en ces lieux : le bureau du directeur des charbonnages, la salle de paie des employés et le bureau du comptable attenant. Ces parties étant visibles pendant la visite du musée, elles furent inaccessibles au public le temps de la préparation et du tournage, ce qui équivaut grosso modo à deux semaines de travail sur cette série.

En amont, le repéreur de lieux de tournage – ou location scout – était venu faire le tour du site pour y prendre des photos et voir quelles parties pouvaient correspondre aux endroits recherchés pour le scénario. Notamment une cour intérieure avec des pavés et d’anciens bâtiments qui pouvaient représenter les extérieurs de la fameuse brasserie. Bois-du-Luc ne convenait pas pour ceci et c’est finalement au Musée de la vie wallonne à Liège que ces scènes ont été tournées. Par contre, à Bois-du-Luc, les bureaux administratifs de l’ancien site minier sont bien devenus à l’image les intérieurs des bureaux de la brasserie Deibel Prank née de l’union des deux brasseries concurrentes de la première saison.

Détail du bureau imposant de Roman Hoflinger; fût et bière Palm utilisés à Bois-du-Luc

À ce propos, pensiez-vous en toute logique que la bière utilisée sur le tournage était d’origine allemande ? Alors, je ne sais pas pour la première saison, mais pour cette seconde salve d’épisodes, je peux vous affirmer que la bière servie lors des scènes tournées en région du Centre était bien belge : il s’agit de la marque Palm ! Dans sa déclinaison sans alcool, j’ose imaginer.

À l’approche de la date du tournage, les décorateurs débarquent à leur tour afin de prendre des photos et des mesures, ils commencent à imaginer où installer le mobilier sur base des indications de scénario qu’ils possèdent, ils doivent surtout respecter les particularités d’un tournage dans un lieu classé. Rien ne peut être repeint, percé ni ne laisser aucune trace durable. Tout ce qui est construit doit être pensé pour être soit posé, soit encastré, tout doit être amovible. C’est valable pour la pose de nouveaux rideaux, de stores, de cadres aux murs, etc. Je vous en parlais déjà lors du tournage du film Wil (de Tim Mielants).

Accessoires utilisés dans les bureaux à Bois-du-Luc : journal, calendrier mural, objets décoratifs liés à la brasserie

Sur Oktoberfest, deux équipes de décorateurs de cinéma sont intervenues : l’une allemande et l’autre belge. Des meubles aux rideaux, des objets décoratifs au matériel de bureau, importés d’Allemagne ou bien chinés en Belgique, trouvés chez les antiquaires ou commandés en ligne. Un travail qui demande minutie et respect de la période traitée dans l’histoire afin d’éviter les anachronismes trop visibles.

Une quantité d’objets impressionnante que l’on n’aperçoit parfois que quelques secondes à l’écran, et quantité d’autres qui resteront dans les boîtes en carton en coulisses car le réalisateur ne les trouvera pas pertinents, au final, ou pour toute autre raison pratique.

Il faut ensuite mentionner les spécialistes en accessoires qui viennent avec des faux journaux et affiches, des cigarettes sans tabac et des cigares factices, etc.

Outre le bureau du directeur dont les meubles ont été changés et les objets décoratifs qui ont remplacé ceux du musée – les objets liés à la mine étant substitués par des bibelots en rapport avec la bière – la pièce qui a demandé le plus de travail est la salle de paie des employés. C’est là qu’a été installée la maquette du Bierburg que Curt Prank rêve de construire, une construction amenée à remplacer les habituelles tentes éphémères de la grand messe de la bière, capable d’accueillir plusieurs milliers de personnes à la fois, chopes à la main, et dotée d’une montagne russe, anticipant ainsi sur les parcs d’attraction qui vont foisonner dans le monde au cours du 20e siècle.

La maquette de l’empire de la bière de Curt Prank

Dans cette même pièce, les deux immenses cadres en bois fixés au mur qui commémorent un anniversaire important des anciens charbonnages ne pouvant être décrochés, les décorateurs ont simplement apposé sur les vitres des document imprimés sur un matériau souple et solide (du PVC expansé, peut-être ?), chaque élément découpé afin de parfaitement s’adapter à chacune des zones des cadres. Des photos en noir et blanc en rapport avec le secteur brassicole, un plan de Munich indiquant l’emplacement historique de la fête, un plan de la maquette du Bierburg, une affiche avec le logo en couleur de la brasserie Deibel-Prank et le portrait des deux copropriétaires (les acteurs Misel Maticevic et Klaus Steinbacher). De près comme à l’écran, on n’y voit que du feu ! Dans le même ordre d’idées, les plaques émaillées sur les portes avec le nom des bureaux du charbonnage ont été recouvertes par des stickers dorés aux titres adéquats : Direktion ou Besprechnungsraum.

Le bureau de Roman Hoflinger et la salle de paie du musée relookée

Ensuite arrive le moment des prises de vue, les acteurs principaux et les figurants circulent dans la cour des ateliers du musée, en costumes. Ils entrent pour tourner leurs scènes, ils ressortent prendre le soleil en ce mois de mars plutôt clément, ils discutent, fument une cigarette… L’acteur Klaus Steinbacher (Roman dans la série) fait ses échauffements dans la pelouse du musée avant de reprendre la scène.

Quand midi sonne, tout s’arrête le temps du repas. Le catering installé dans une salle du musée proposait un nouveau menu chaque jour, option végétarienne incluse; j’ai d’ailleurs eu l’occasion d’y manger une fois en compagnie de membres du personnel du musée, l’actrice Mercedes Müller (Clara Prank) nous saluant d’un hochement de tête et nous gratifiant d’un sourire lorsqu’elle vint se sustenter à son tour. Une scène du quotidien pour les acteurs.rices mais quelque peu surréaliste pour nous, simples spectateurs.

Les acteurs se reposent au soleil entre deux scènes; le village de Bois-du-Luc occupé par les camions de la technique; le matériel dans le bureau du directeur.

La journée avait commencé pour moi en croisant le réalisateur de télévision Stephan Lacant venu faire le tour des intérieurs, elle s’est terminée en suivant les figurants en costumes à la fin de leur journée. Entretemps, j’avais aussi pu circuler dans la zone où étaient garées les caravanes des acteurs et où se trouvait le petit espace catering en extérieur pour le petit déjeuner. Tout le village de Bois-du-Luc était occupé par ces caravanes et par les camions des équipements techniques (dont ceux de la société allemande Cinegate), une armée impressionnante qui débarquait le temps de mettre en boîte toutes les scènes d’intérieur des bureaux de la brasserie pour cette saison 2.

Le clap entre mes mains (15 mars 2024); les figurants ont terminé pour aujourd’hui

Je vous reparlerai bientôt de cette saison avec comparaison entre les scènes de la série et les lieux de tournage en Belgique. Restez à l’écoute !

Bande annonce de la saison 2 d’Oktoberfest (en allemand sans sous-titres)

Pour retrouver les coulisses d’autres tournages. Pour d’autres films et séries tournés à Bois-du-Luc.

Photos : @Simply.Mad 2024
Affiche et bande annonce de la série ©Violet Pictures, ©DasErste
Avec tous mes remerciements au Musée de la Mine et du Développement Durable, Bois-du-Luc ©MMDD

Publié par Simply.Mad

Geek, cinéphile, fan de science-fiction et de bande dessinée. Aime un peu trop le chocolat.

2 commentaires sur « Dans les coulisses de la série Oktoberfest »

  1. Super article ! On sent la passion du cinéma jusque dans les moindres détails techniques. J’adore cette plongée dans les coulisses — là où la magie prend forme avant même le premier « moteur ! ». Entre les bières belges, les faux journaux et les meubles d’époque, on croirait presque sentir l’odeur du plateau. Merci pour ce voyage entre Histoire, fiction et artisanat du 7e art.

    J’aime

    1. Merci beaucoup d’avoir pris le temps d’écrire ce commentaire, j’apprécie! C’était ma première expérience de ce genre, quand on est fan de cinéma depuis toujours, c’est fascinant à voir de l’intérieur. Je prévois d’autres articles du genre dans les prochains mois!

      Aimé par 1 personne

Répondre à Berok Graffiti Barcelona Annuler la réponse.