
On peut exterminer toute une génération, raser les maisons des gens, ils les rebâtiront. Et si vous détruisez leur mémoire, leur histoire, c’est comme s’ils n’avaient jamais existé.
Frank Stokes (George Clooney)
Deux oeuvres d’art majeures hébergées en Belgique et devenues personnages d’un film sur la seconde guerre mondiale. Balade quasi bucolique en Bavière. Voilà ce qui est au programme du film de 2014 Monuments Men (en gros).
Co-écrit, réalisé et interprété par George Clooney, avec Matt Damon, Cate Blanchett, John Goodman, Bill Murray, Jean Dujardin.
George Clooney est venu poser sa caméra en Allemagne, aux studios Babelsberg notamment, pour mettre en image le roman de Robert M. Edsel basé sur des faits réels. Retour vers le passé: 1943, Hitler a fait embarquer des millions de pièces de collection volées à des particuliers et des musées dans les pays envahis par son armée. Depuis 10 ans, en commençant par la spoliation des Juifs en Allemagne et puis ailleurs, le parti Nazi prépare inlassablement un objectif du Führer : abriter ces oeuvres dans un musée gigantesque qu’Hitler veut faire construire dans son pays d’origine, l’Autriche. Le rêve déjanté d’un artiste manqué devenu mégalomane. Aux Etats-Unis, une commission est créée afin de sauver le patrimoine culturel de la Vieille Europe des mains des Nazis, le Monuments, Fine Arts, and Archives program est né, regroupant plusieurs centaines d’hommes et de femmes venus de 14 nations alliées, ils et elles sont historien(ne)s, directeurs de musées, curateurs, bibliothécaires… Une tâche ardue leur est confiée qui durera encore après la fin de la guerre : localiser, retrouver, répertorier et rendre à leurs propriétaires privés ou institutionnels les biens volés.
Le film de Clooney se penche sur la mission menée sur le terrain, à la suite des forces alliées, au fur et à mesure du recul de l’ennemi, de ces hommes plus intéressés par la culture que par la guerre.
Début du film, nous sommes à Gand, les chanoines de la cathédrale Saint-Bavon tentent de protéger leur pièce maîtresse datant du 15ème siècle devant l’avancée de l’armée allemande. En effet, dès 1940, l’Agneau Mystique de Hubert et Jan Van Eyck est envoyé au Vatican… sauf que le polyptyque (aussi connu sous l’appellation Retable de Gand) n’ira pas plus loin que le Sud de la France suite à la montée du fascisme en Italie. Deux ans plus tard, Hitler fait rapatrier le retable dans la mine de sel d’Altaussee en Autriche, et comme montré dans le film, c’est là qu’il sera retrouvé par les hommes des monuments et rendu à la Belgique par la suite.



Nos héros s’arrêtent aussi au château de Neuschwanstein, palais féérique du roi Louis II de Bavière hissé sur son promontoire face aux Alpes majestueuses. Dans la cour, une sculpture majestueuse de Rodin, Les Bourgeois de Calais, accueille la troupe. Il existe 12 copies authentiques du bronze visibles dans plusieurs endroits du monde, l’une d’entre elles se trouve par chance tout près de chez moi, dans le parc du Musée de Mariemont (Hainaut).



La Madone de Michel-Ange, autrement plus connue sous le nom de Vierge à l’Enfant, est également retrouvée dans la mine de sel d’Altaussee. Comme dans le film, embarquée à la va-vite par les Allemands lors de la retraite de 1944, elle retrouvera sa place à l’église Notre-Dame de Bruges où elle se laisse admirer par les visiteurs depuis le 16ème siècle. Il s’agit d’ailleurs de la seule statue de l’artiste à avoir quitté l’Italie de son vivant.
Dernière séquence du film, flash-forward vers le présent, un Frank Stokes plus âgé (le personnage joué par George Clooney) admire la Madone à Bruges. Cette scène qui clôture le film de belle manière est d’autant plus touchante par le fait que c’est le propre père de l’acteur, Nick Clooney, qui prête ses traits au Stokes âgé.
Il est un peu dommage que les scènes supposées se passer à Gand et Bruges n’aient pas réellement été tournées sur place et les vraies oeuvres n’apparaissent donc pas dans le film, des églises de substitution ayant été trouvées en Allemagne, ce qui met un peu à mal l’objectif de véracité historique du long métrage. Au moins le vrai Château de Neuschwanstein apparaît bel et bien dans le film, lui.
J’ai pu visiter le château en 2012, voir la Madone à Bruges en 2016 et le Retable à Gand en 2017, ce dernier était encore en restauration à l’époque, travail visible à travers sa vitre de protection.




Neuschwanstein en rénovation en 2012, La Madone de Bruges réalité (2016) vs film (2014) et Les Bourgeois de Calais à Mariemont en 2020
Vous pouvez retrouver plus d’images tirées du film dans la rubrique Galerie de photos du site.
Vers les autres tournages à Bruges
Photos : @Simply.Mad 2012, 2016, 2017 et 2020 (et captures d'écran du DVD Monuments Men, 20th Century Fox 2014)